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Compte rendu de la rencontre du lundi 26 Avril 2010

Thème : la mort est elle une fin ?

Dix huit personnes ont participé à la Rencontre :

Serge Lionel Daniel Jenny Florence Dominique Nathalie Jean-Christophe Bruno Henk

Nadège Christian Marie-Gabrielle Dominique Françoise François Jean-Paul Dominique*

La mort est le tournant de la route, Mourir, c’est seulement ne pas être Vu. Si j’écoute, j’entends tes pas exister comme j’existe. Fernando Pessoa : je ne suis personne

Un  « sujet » encombrant. 

Parlez de la mort c’est facile, parce que c’est toujours celle des autres… Mais alors pourquoi la craindre ?

Il y a ceux qui en ont peur, d’autres qui s’en moquent, mais ne voudraient pas souffrir en l’attendant, d’autres encore qui redoutent au plus haut point la décrépitude, la vieillesse… si tu t’imagines fillette fillette, sa va sa va sa va durer toujours… l’on connait la suite.

C’est l’incertitude qui pose problème… Comment passe-t-on de ce monde au néant, voire à quelque chose de mystérieux… Résurrection, avatars, métempsychose, renaissance… Comment savoir ? Peut-on choisir ?

Peut-on choisir aussi sa mort ? Un bel accident, ou bien on se couche heureux et on meurt pendant son sommeil, la belle affaire… Bref on se débine en catimini, la farce est jouée.

Mais les choses ne sont pas simples, car, il y a le corps (on croît pouvoir s’en arranger) ;  l’esprit (on pense en avoir suffisamment) ; mais aussi l’âme…

C’est pas facile l’âme, on ne sait pas très bien ce que c’est. Parfois aussi, il existe un « double »… Comme en Afrique ou chez les Aborigènes… Bref on meurt mais pas complètement… Il y a un petit quelque chose qui subsiste, mais quoi exactement ? C’est embêtant cette incertitude…  C’est un à peu près qui se veut à la fois transcendantal et scientifique…

Il y a plusieurs façons de parler de la mort selon que l’on se réfère au corps, à l’âme, ou à l’esprit.

Que reste-t-il de nos amours ?

Le corps c’est le véhicule, il sert uniquement sur terre, après, on il semble que l’on s’en passe très bien.

L’esprit c’est le réservoir des âmes… Platon fut sans doute le premier spécialiste de l’âme. Tous les vivants ont un corps, les dieux comme les démons et les hommes, les animaux aussi. A un certain niveau elle est susceptible de contempler l’intelligible, c’est-à-dire le monde des Idées… Mais ce n’est pas le sujet de ce soir… Par contre la gestion des âmes n’est pas chose aisée, en effet « le nombre des âmes est constant… si l’on prend pour acquis que l’âme est chose immortelle… »[1].  Bref une âme sert plusieurs fois, elle passe de corps en corps au fur et à mesure que ce dernier meurt, mais le nombre de « vivants » augmentant  sans cesse on devrait rapidement manquer d’âme. La réserve d’âmes n’est pas inépuisable.

Personne ce soir n’a trouvé la réponse… Platon donne-t-il une explication ?

Voici là un long travail pour les amateurs d’âmes[2].

L’âme serait aussi comme un intermédiaire entre corps (corporalité) et esprit (transcendance)  Un principe de vie.

La mort est certes une fin pour tout ce qui concerne les douleurs et les plaisirs terrestres, cela ne semble faire aucun doute pour personne, mais reste-t-il quelque chose à transmettre au-delà de la mort, soit pour ceux qui après nous vivront, soit dans une vision universelle de la substance existante ? La réponse n’est pas simple.

Ce qui entraîne une autre réflexion : A quoi sert la mort ? Comment l’approcher ?

Quelques réponses :

  • Pour qu’il y ait un début
  • L’acteur meurt, pas le rôle
  • Accepter la vie c’est accepter la mort
  • C’est un phénomène naturel
  • De la prise de conscience de la mort est née la philosophie
  • Pour qu’il y ait une transformation constante de l’univers (chaos et logos tout à tour).

La question de savoir ce qu’il y a après la mort a exactement le même sens que celle de l’enfant qui demande « Où j’étais avant ? ».

Peut-on dire que la naissance est comme une mort à l’envers ?

Il a été fait allusion à saint Paul et à sa fameuse déclaration au sujet de la Charité… En ce qu’elle pourrait contenir toute l’essence d’une parfaite transmission de l’Esprit non seulement chrétien mais tout simplement philosophique. Cette citation mérite d’être citée dans son intégralité.

13.1        Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit.

13.2        Et quand j’aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j’aurais même toute la foi jusqu’à transporter des montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien.

13.3        Et quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais même mon corps pour être brûlé, si je n’ai pas la charité, cela ne me sert de rien.

13.4        La charité est patiente, elle est pleine de bonté; la charité n’est point envieuse; la charité ne se vante point, elle ne s’enfle point d’orgueil,

13.5        Elle ne fait rien de malhonnête, elle ne cherche point son intérêt, elle ne s’irrite point, elle ne soupçonne point le mal,

13.6        Elle ne se réjouit point de l’injustice, mais elle se réjouit de la vérité;

13.7        Elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle supporte tout.

13.8        La charité ne périt jamais. Les prophéties prendront fin, les langues cesseront, la connaissance disparaîtra.

13.9        Car nous connaissons en partie, et nous prophétisons en partie,

13.10     Mais quand ce qui est parfait sera venu, ce qui est partiel disparaîtra.

13.11     Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant; lorsque je suis devenu homme, j’ai fait disparaître ce qui était de l’enfant.

13.12     Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière obscure, mais alors nous verrons face à face; aujourd’hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu.

13.13     Maintenant donc ces trois choses demeurent: la foi, l’espérance, la charité; mais la plus grande de ces choses, c’est la charité[3]

La mort escamotée.

Il y a plusieurs façons de se comporter face à la mort.

Celle du soldat qui la reçoit comme les Grecs anciens acceptaient le Destin… Les Poilus de 14-18, on ne leur avait pas demandé leur avis, et ils savaient en montant au front que leur chance de survivre était quasi nulle… on trouvait des raisons : la Patrie… les hordes sauvages… Idem de l’autre côté… Ils étaient floués, ils le savaient… La mort était une fin puisque l’on ne leur laissait pas le choix…

Pourtant on était – tout au cours du long Moyen-âge – parvenu à force de famines de guerres et d’épidémies, à l’apprivoiser, à coups de rites, de messes, de processions.. On savait qu’il y avait « quelque chose » après la mort, et on savait passer de vie à trépas le plus convenablement possible… convenablement, c’est-à-dire selon les « convenances ».

Les rites de passages concernant la mort n’ont plus cours dans nos sociétés occidentales.

Les onctions, les prêtres, les passeurs d’âmes, les psychopompes de tous poils, les te deum, tout un artifice déployé  afin d’aider à passer la porte étroite, la dernière, celle dont on ne revient pas… Cela méritait quelques soins et attentions.

De nos jours on cache, on dissimule le défunt… On ne le veille plus, on l’expédie au cimetière sans attendre… la mort solitaire est honteuse, et les morts en masse, les massacres, sont devenues des statistiques.

Freud à été cité, comme affirmant que « l’inconscient ne connaît pas la Mort »… La discussion s’est avancée un peu sur ce chemin… Où l’apparence, le caché et l’imagination ont à voir aussi avec la « fin »… la transmission… rassembler ce qui est épars…

En attendant la fin du Monde.

Au cours de la discussion il s’est fait une certaine unanimité pour admettre que le corps ne mourait pas réellement car après s’être séparé de l’esprit, les cellules qui le constituent se transforment pour former de nouvelles formes.

Puis on a supposé que l’âme ne mourait pas non plus parce qu’elle pouvait rejoindre une espèce de réserve (Platon)… Ou retournait à Dieu. Ce n’est qu’une question de croyance puisque rien ne l’affirme ni ne l’infirme scientifiquement.

Quant à l’esprit, on ne sait plus très bien quel est son sort.

Si l’esprit provient de Dieu, pas de problème, il subit le sort de l’âme…

Par contre si l’esprit est issu de la matière,  il faudra donc supposer qu’il est lui aussi réutilisé sous de nouvelles formes…

Prochaine Rencontre : Lundi 17 mai 2010.

Sujet : A qui appartient le corps humain ?

[1] Platon : « Phèdre » GF Flammarion – traduction et notes Luc Brisson.

[2] Giono : « Un roi sans divertissement ».

[3] Saint Paul : 1 Corinthiens 13 et ss.