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Pinocchio

Nous sommes tous des Pinocchio, tous à l’image de ce pantin de bois relié à un mécanisme des plus simples qui est animé par une multitude de ficelles qui le font se mouvoir. Nous sommes prisonniers malgré nous, comme l’est Pinocchio dans son corps de bûche. Nous sommes nous-mêmes manipulés par une multitude de ficelles invisibles. Mais si le marionnettiste anime Pinocchio, qui est celui qui manipule nos propres ficelles ? Que sont ces ficelles et quels sont leurs points d’attache en nous ?

C’est notre ego le manipulateur, c’est lui qui tire adroitement les ficelles et ces ficelles sont : les désirs, les passions, mais aussi, notre orgueil, notre fierté mal placée, les petits mensonges sans importance qui font que notre nez s’allonge, comme celui de Pinocchio. Notre ego se sert de tout cela pour nous manipuler dans un dessein qu’on ignore en tant que pantin. Il nous maintient aux ordres, dès qu’il tire sur une ficelle telle une marionnette, on s’exécute. Il suffit qu’il en tire plusieurs en même temps et on court dans tous les sens.

Tant que les ficelles résistent, on obéit et dès qu’une vient à casser, il s’empresse de la réparer pour que l’on ne réagisse pas. Cependant, sa fin est proche, car sur le chemin maçonnique on rencontre un allié, notre conscience. Celle de Pinocchio s’appelle Jiminy Criquet, la nôtre aussi doit porter un nom, car en ce cas-là comment pouvons-nous l’interpeller ? Aussi je laisse le soin à chacun de baptiser sa propre conscience. Elle nous aide uniquement si nous sommes honnêtes avec elle, si nous travaillons avec zèle, constance et régularité. Elle nous donne alors en récompense le droit de supprimer une ficelle que le manipulateur ne peut en aucune manière réparer, car ce n’est pas la ficelle qui est coupée, mais le point d’attache qui disparaît.

L’ego est ainsi pris à son propre jeu, qui, sans ne rien savoir de ce qui se trame, continue de tirer les ficelles mais sans quoi que ce soit au bout. Bien évidemment, tous les points d’attache ne se suppriment pas d’un seul coup, mais la pugnacité et la persévérance en viennent à bout. C’est cela la liberté, et non de braver l’interdiction de marcher sur la pelouse. Il n’y a aucune liberté à transgresser les règles uniquement pour le simple fait de les transgresser. Non seulement dans ce type de transgression il n’y a aucune liberté, mais en plus on offre au marionnettiste un nouveau point d’attache.

Tous nos faits et gestes sont définis par nos points d’attache. Toutes les fois que l’on se plaint que nos journées sont trop courtes au regard de ce que l’on a à accomplir, c’est parce que l’on a multiplié les points d’attache. Dès que l’on est débordé, c’est parce que les points d’achoppement sont trop importants. Dès que l’on crée un point d’attache, une ficelle y est reliée et on est un peu plus manipulé par les uns et par les autres.

Notre ego n’est pas le seul à attacher une ficelle sur le point que l’on crée, n’importe qui peut en attacher une et ainsi, si l’on peut dire, nous mener par le bout du nez. Au même titre que même nous, nous ne nous gênons en rien pour tirer et manœuvrer les ficelles des autres, certains prennent un malin plaisir à tirer les nôtres. Nous ne faisons que cela tout au long de la journée et lorsque tout s’est bien passé, c’est que l’affaire a été bien ficelée.

Nous avons tous en tête une multitude de stratégies à mettre en œuvre et notre première préoccupation est de trouver les bonnes ficelles sur lesquelles on va pouvoir tirer. Comment dans ces conditions pourrions-nous espérer nous libérer, alors que l’on ignore l’existence même de ces ficelles invisibles ? Comment pourrions-nous atteindre le but que l’on s’est fixé, alors que les ficelles guident nos pas à l’opposé ?

Le chemin initiatique a été conçu pour cela, si l’on est sincère dans notre démarche. Dans le cas contraire, il devient un tiraillement supplémentaire, une douleur de plus à vouloir faire le grand écart alors que l’on n’en a pas la souplesse. Mais si l’on est patient, attentif, persévérant, V.I.T.R.I.O.L nous permet de répertorier tous nos points d’attache qui font que nous sommes des pantins faits de chairs et d’os. Une fois ce travail de recensement réalisé, on peut alors entrer en action afin de les dissoudre en ordre.

Le premier travail de libération consiste, même si de prime à bord cela n’en a pas l’air, à créer de moins en moins de nouveaux points d’attache. Ensuite, de supprimer de plus en plus les points d’attache existants, afin qu’un jour on en supprime davantage que l’on en crée, et que définitivement on s’en libère.

Si j’ai un air bizarre, si je marche de guingois, c’est parce que je ne peux supprimer qu’un à un les points d’attache et que cela crée en moi un certain déséquilibre. Mais toutes les fois que je donne à penser que mon corps s’atrophie, c’est que je me libère un peu plus.

J’ai dit                                                                                                                                           François LINDO-DIEZ                                                                                            Janvier 6012.